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 Le captif et la tête du mort

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Rowan Altenberg

Rowan Altenberg


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MessageSujet: Le captif et la tête du mort   Le captif et la tête du mort Icon_minitimeDim 19 Sep 2010 - 22:04

[suite de CECI...]

Le trajet a été long, fatiguant.
Plus fatiguant pour l'homme que pour elle, et sur les trois dernières lieues il soufflait et geignait de plus en plus souvent. Impossible de lui bricoler une béquille, avec ses deux épaules perforées de dagues, évidemment... Tant pis pour lui, donc. Qu'il marche.

Non, ce qui est fatiguant, c'est la vigilance constante dont elle fait preuve, d'une part pour le diriger sur le terrain le moins ardu possible, d'autre part pour éviter de devoir mettre sa menace à exécution. Le type est finaud. Il l'a testée. La dague a filé et s'est plantée dans un tronc voisin de sa tête au moment où il faisait une embardée pour sortir du sentier qu'elle lui avait indiqué...

- La prochaine partira avec une de tes oreilles. Et si t'as encore envie de jouer, je t'avertis que tu seras toujours capable de marcher avec une de tes couilles en pendentif. A toi de voir si ça te tente toujours...

Après ça, il s'était tenu tranquille.

L'aube se dessine comme ils sortent de la forêt. Le captif clopine sur le chemin, vers le village où l'activité est encore somnolente, et elle le suit. Elle a l'épaule douloureuse, une tête, c'est lourd, à force. Rodéric traverse le village sur les quelques instructions sèches qu'elle lui lance à mi-voix, éveillant l'attention de deux filles venues chercher de l'eau au puits, et d'Ecbert, déjà à sa forge malgré l'heure matinale, et qui la salue d'un lever de marteau.

Elle le fait s'arrêter devant les sentinelles qui gardent l'accès à la forteresse, et qui l'ont regardée arriver avec un froncement de sourcil soupçonneux. Ils la connaissent, tous les hommes la connaissent depuis l'épisode où une grande partie des leurs ont reçu ses soins. Ils ont l'habitude de la laisser passer. Mais pas accompagnée d'un guerrier foutrement mal en point, porteuse d'un sac bizarre que flairent trois chiens intéressés, et en "tenue légère". Ils ont déjà pu apprécier la "tenue légère" la fois où elle a ramené leur chef à moitié dans le pâté, et il n'entrait pas dans ses projets de la leur remettre en mémoire, mais soit...

- Le jarl est-il de retour ? Il faut que je lui parle. Ou à défaut, à celui qui commande ici en son absence. L'un de vous pourrait-il avoir l'obligeance d'aller prévenir qui de droit ?

Courtoisie, politesse, respect.
... Simagrées.


Elle contient son soupir agacé, ne sourit pas parce que ce qu'elle a à dire ne s'y prête pas, mais reste devant les yeux hommes, patiente, et la mine aussi humble que possible. Elle jette un regard à son prisonnier qui a viré au blême, limite verdâtre, le front en sueur et le souffle rauque, tout en décochant quand même un coup de talon bien senti à l'un des cabots qui s'enhardit jusqu'à essayer de déchirer le baluchon...

- Hum... c'est... assez urgent, en fait.

Là elle tente un sourire rapide. Maladroit. Question d'habitude.
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Ivar Grimsson
Capitaine de navire
Ivar Grimsson


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MessageSujet: Re: Le captif et la tête du mort   Le captif et la tête du mort Icon_minitimeDim 26 Sep 2010 - 0:02

Ivar se lève péniblement, s'étire rapidement. L'âge commence à se faire sentir et son dos est raide le matin au réveil. Il lui faut un petit moment pour être vraiment en forme. Dix minutes, pas plus. Sauf qu'aujourd'hui, il ne les a pas. Et, une fois de plus, il maudit Ragnar d'être parti en lui laissant la charge de la citadelle.

Il avait parié qu'il ne se passerait absolument rien et qu'il n'aurait qu'à rester gentiment assis en attendant que le jarl revienne avec d'autres hommes. Sauf que les évènements semblent s'accélérer, s'emballer depuis le départ de Ragnar. Et la moindre erreur pourrait avoir des conséquences graves.

Dépêche-toi de revenir, Ragnar. J'en ai assez.


Les mauvaises nouvelles se sont enchaînées. Après l'arrivée des émissaires d'Henri de Kassel et de l'inquiétant mercenaire au regard glacial et aux questions un peu trop précises, un homme vient de le tirer du lit. Pour lui apprendre l'évasion de l'autre esclave personnelle de Ragnar, et l'arrivée d'un nouveau prisonnier avec Rowan. En grommelant, Ivar descend à la grand'salle, en ordonnant qu'on mette le prisonnier en lieu sûr et qu'on accueille la fille avec tous les égards. Sans même parler des lois de l'hospitalité, la forestière a la faveur de Ragnar et a prouvé sa compétence et sa loyauté. Il convient donc de l'accueillir comme il convient.

En pestant toujours, Ivar entame lentement la descente des escaliers. Il s'agit de calculer le rythme : pas trop rapide pour que ses articulations soient relativement souples lorsqu'il verra Rowan. Pas trop lentement, pour ne pas la faire attendre excessivement. Il n'a pas eu le temps de faire ses ablutions matinales, il ressemble à un ours en colère, en a conscience et s'en fiche éperdument. En fait, il frapperait volontiers quelqu'un à grands coups de marteau, juste pour se défouler un peu. Il veut un ennemi tangible et donc susceptible de mourir, plutôt que passer son temps à louvoyer entre manœuvres politiques et intrigues.

Comment cette folle furieuse a-t-elle pu s'échapper de la pièce où elle était ?

La porte avait été retrouvée couverte de marques d'ongles, mais finalement c'était la serrure qui avait lâché. Un canot avait disparu.

Idiote. Petite idiote. Tu vas mourir noyée, c'est tout ce que tu auras gagné. Tu aurais pu vivre dans un confort relatif. Nous obéissons tous à quelqu'un. Ou quelque chose. Esclaves comme seigneurs.


Ragnar avait commis une erreur en la mettant dans une pièce pour les serviteurs. Elles ne sont pas faites pour empêcher les évasions, contrairement aux cachots. En réalité, il a commis une erreur même en l'achetant. Ivar a un sourire. Le jarl n'a jamais su résister à un défi.

En arrivant dans la salle, Ivar accueille Rowan avec un sourire. Une poignée de main serait appropriée, mais il a déjà remarqué qu'elle n'apprécie pas outre mesure le contact physique. Contrairement à la plupart de ses compagnons, Ivar n'a jamais forcé une femme. Son côté paternel, peut-être.

Salutations, Rowan. Je suis heureux de te revoir ici. Je devine que ce n'est pas une visite de courtoisie, mais je te propose d'en parler tout en nous restaurant. Tu dois être épuisée. Le prisonnier va être mis sous les verrous, nous avons tout le temps.

Façon de parler. Un mort et un prisonnier... Probablement des espions de Romaric de Boiscendré. Et pour qui travaille Romaric de Boiscendré ? Mais nous avons tout de même le temps de manger.

Le capitaine remercie d'un signe de tête le serviteur venu poser de la bière, du pain et des fruits sur une des tables. Un autre allume le feu. La pièce est encore froide de la nuit, mais, installés juste devant la cheminée, ils pourront rapidement être relativement à l'aise.
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Rowan Altenberg

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MessageSujet: Re: Le captif et la tête du mort   Le captif et la tête du mort Icon_minitimeLun 4 Oct 2010 - 22:23

Moi, épuisée ?
J'ai l'air épuisée ?
... quand même pas tant que ça, si ?


En fait, si. Marcher dans la forêt ne lui est pas plus pénible que de cheminer tranquillement le long d'une route. Mais ici elle a du maintenir une attention constante braquée sur son captif, guetter dans ses mouvements le moindre signe de coup tordu. Elle ne le craint pas vraiment, il est plutôt amoché, et elle garde une distance suffisante pour être au large question temps de réaction... mais quand même. Ca crève plus qu'une chasse nocturne. Mais bon, épuisée... le mot est un peu fort. Elle ne le relève cependant pas. Son hôte veut probablement juste se montrer courtois. Et il le fait avec une rudesse bourrue qui trahit son manque d'habitude et son malaise. C'est quelque chose que que Rowan connaît bien. Elle est comme ça à peu près tout le temps, à partir du moment où l'un de ses semblables est à portée de regard.

Elle suit Ivar dans la pièce où un serviteur s'empresse de faire du feu. Une table déjà chargée de victuailles les attend, et elle se découvre une faim de loup. Elle n'a pas froid, malgré la légèreté de sa mise. Mais la chaleur du feu la revigore, et elle s'en approche avec grand plaisir, laissant Ivar choisir sa place le premier, afin de ne pas commettre l'impair de s'installer là où elle ne devrait pas... Elle se méfie encore d'eux et de la rigidité de leurs usages. Mieux vaut attendre un instant et observer, ça peut permettre d'éviter pas mal d'emmerdements...

Elle a toujours à la main sa charge macabre, la tête du deuxième homme. Autant s'en débarrasser au plus vite, et lui faire remplir l'office pour laquelle elle se l'est coltinée sur plusieurs lieues. Elle rassemble quelques poignées de jonchée au cas où cette saleté aurait encore quelque chose à saigner, dépose son paquet, s'accroupit, et écarte l'étoffe souillée de la cape, frottant un peu au passage le visage aux yeux ouverts, encore marqué par l'expression de surprise avec laquelle la mort la pris. Elle regarde Ivar et s'écarte un peu pour qu'il puisse voir.

- J'ai ramené la tête du deuxième homme, au cas où tu l'aurais déjà vu ?

Au signe de tête négatif de l'autre, elle grimace.

- Bon... Alors les cochons auront un petit-déjeuner spécial. Sauf si tu veux en faire quelque chose comme une décoration murale pour les remparts, là-dehors ?...

Elle remballe la tête et l'éloigne du feu, autant éviter de chauffer la viande morte, ça la fait puer plus vite. Elle se relève en faisant jouer son épaule douloureuse. Elle a porté la tête de la main gauche pendant tout le trajet, la droite, la plus habile, tenait une dague prête pour le prisonnier, aussi elle a le dos un peu raide et la nuque douloureuse. Et puis il y a cette estafilade au flanc, aussi, qui la lance méchamment à certains gestes qu'elle fait. Elle rejoint Ivar auprès de la table, et s'installe dans le second fauteuil, le front barré de rides soucieuses.

- Ces deux-là traînaient dans les bois, en parlant de canarder le jarl et ses hommes dès qu'ils auraient trouvé les navires. Et ensuite de cuisiner les survivants, pour leur faire "cracher le morceau". Ce sont leurs mots.

Concentrée, elle cherche à se souvenir de tout.

- Ils appartiennent à un groupe plus grand. Ils l'appellent la "Compagnie". Probablement assez nombreux pour qu'ils aient quelques putains à la traîne, ou des esclaves, je les ai entendu en parler. Ce type que je t'ai ramené, il s'appelle Rodéric. Il a essayé de me faire peur en disant que "les autres" le retrouveraient. Mais je ne sais pas combien sont ces autres, ni quel est ce "morceau" qu'ils voulaient faire cracher.

Elle accepte une coupe de bière brune et sucrée, et grignote un morceau de pain à la mie épicée, encore chaud, délicieux. Ce sont des mets comme elle en savoure peu, au fond des bois où elle vit... Ca et la chaleur du grand feu... elle sent la fatigue de la nuit la gagner, sournoisement...
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Ivar Grimsson
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MessageSujet: Re: Le captif et la tête du mort   Le captif et la tête du mort Icon_minitimeLun 11 Oct 2010 - 9:43

Pauvre petite...

La nuit a été manifestement éprouvante, et les yeux de Rowan papillonnent. Ivar est touché qu'elle ait pris la peine de faire le trajet dans de telles conditions, simplement pour lui rapporter des informations susceptibles de protéger des Suéris dont elle n'a guère de raisons de se soucier. A moins que Ragnar ne soit cette raison... Mais ce qui se passe ou a pu se passer entre deux relève de leur vie privée.

Toujours est-il qu'elle aurait pu se contenter de se cacher dans un buisson, ou encore, d'occire les deux hommes et les laisser pourrir. Ivar aimerait lui mettre une couverture sur les épaules et la laisser s'endormir au coin du feu, mais malheureusement, il y a encore d'autres questions sans réponse.

Pour ce qui est de leur nombre, le prisonnier nous livrera les informations nécessaires.

Sa main se rapproche de la garde de son poignard à cette pensée.

Bon sang... pourvu que le prisonnier ne fasse pas de difficultés. Je déteste leur arracher les informations.

En parlant d'informations, la notion même de "cracher le morceau" est intéressante. Elle implique que la Compagnie, quoi qu'elle soit, pense que les hommes possèdent une information importante. Quelle information vitale pourrait être connue de la plupart des hommes de Ragnar ? Ivar aurait eu du mal à faire le lien dans d'autres circonstances. Mais, en l'occurrence, c'est très facile. Le souvenir du regard glacial de Romaric de Boiscendré est encore vivace dans son souvenir. Il peut aussi imaginer la flamme qu'il verra dans les yeux de Ragnar lorsque ce dernier comprendra que de nombreux combats s'annoncent. Mais Ivar, lui, est incapable de l'éprouver.

Je suppose qu'ils se sont bien battus ?

Et que tu t'es battue mieux encore... Il y a un voile de mystère autour de toi... Rowan Altenberg.

J'ai déjà une partie des informations. Les hommes que tu as combattu appartiennent sans doute à la Compagnie de l'Arc Blême. De très bons archers. Et des spécialistes de la vente d'êtres humains.


Il fixe un instant sa chope, d'un air sombre.

Ce sont de mauvaises nouvelles, mais j'aurais dû m'y attendre.

Et je crains que la forêt ne soit bientôt plus un lieu sûr pour toi.

Ivar reçoit les informations, tente de les ordonner dans sa tête pour former un motif cohérent, et élabore quelques hypothèses à partir de cela. Aucune n'est réellement plaisante. Mais, avec ce qu'il sait, il pense que le plus probable est que le légitime propriétaire du navire ait retrouvé leur trace.

Henri de Kassel ?

Mais non, cela ne colle pas. L'émissaire d'Henri de Kassel voulait que l'équipage soit massacré...

J'y réfléchirai plus tard. Je fournirai mes conclusions à Ragnar. Dans tous les cas... il faut se préparer à la guerre.

Les Suéris sont fondamentalement un peuple habitué au combat. Et les hommes de Ragnar le sont encore plus. Mais une expédition et une guerre prolongée ne sont pas du tout la même chose. La guerre implique un plan à long terme, ainsi qu'une certaine intelligence politique et un sens de la logistique. Ce dont Ragnar est relativement peu pourvu. Les pensées tourbillonnent dans la tête du capitaine tandis qu'il attend la réaction de Rowan. Il ne veut pas lui faire partager ses réflexions. Pas encore. D'abord, il ne connaît pas assez la jeune fille... et surtout, il est très important de veiller à l'ordre dans lequel les personnes sont informées. Et Ragnar doit rester en tête de liste.

La seule question importante à laquelle Rowan puisse lui apporter une réponse, finalement, c'est celle qu'il a posée. Est-ce que les hommes se sont bien battus ? Quel est leur niveau de compétence ? Car ce qui fait le succès des Suéris malgré leur infériorité numérique est que, la plupart du temps, ils combattent contre des paysans armés, qui ne sont pas des guerriers dans l'âme. Mais en l'occurrence, il est possible que la donne ait changé.
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Rowan Altenberg

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MessageSujet: Re: Le captif et la tête du mort   Le captif et la tête du mort Icon_minitimeSam 20 Nov 2010 - 19:58

Elle a replié un genou et posé le talon au bord du siège. Peu après elle a fait pareil avec l'autre talon, et posé la joue sur un genou. Elle n'y peut rien, elle a la tête lourde. Il fait bien chaud, et la tiédeur de la bière se répand dans ses membres et les amollit. Qui sait, la posture est peut-être irrespectueuse ? Aïe... Mais là elle est trop claquée, soudain, pour tenir compte de ce genre de détails. Elle exhale un long soupir, et loin de la délasser, il lui semble que le reste de son énergie s'enfuit sur son souffle.

La question d'Ivar la fait sourire. Bien battus... Voilà bien une question d'homme. Elle se contente d'acquiescer. En effet, le survivant, au moins, l'a impressionnée. Mais il n'est pas difficile d'impressionner qui se mesure d'habitude aux bêtes sauvages et aux êtres de moindre intelligence. L'autre homme, d'ailleurs, répondait assez bien à cette définition. Il en est mort.

Elle l'écoute avec tout ce qui lui reste d'attention lui parler de l'Arc Blême, de ses combattants et de ses marchandises particulières. Elle se doutait de ce genre de choses quand elle a entendu l'autre affreux parler de Brisées. Même une femme des bois comprend ce que ça veut dire. Surtout quand elle est femme des bois pour éviter que pareille chose ne lui arrive à elle. Une fille seule ne reste pas libre longtemps, si les hommes et leur avidité connaissent sa retraite.

Elle a la tête lourde. Les paupières plus lourdes encore. Elle se redresse, s'ébroue un peu. Reprend une gorgée de cette bière. S'étire la nuque, et cette épaule douloureuse, avec une légère grimace, avant de tourner ses yeux jaunes vers Ivar, et de s'autoriser une question.

- Tu as un moyen de prévenir ton jarl ? J'ai trouvé deux hommes, mais si ils tiennent tant que ça au "morceau" qu'ils veulent lui faire cracher, et qu'ils sont assez nombreux, ils vont peut-être tenter quelque chose...

Sans doute pas en mer, tout le monde sait que les Suéris sont plus redoutables en mer que n'importe où ailleurs. Mais ces hommes montraient une détermination qui l'a mise mal à l'aise, et qu'elle ne s'explique pas.

Ils étaient dans ma forêt. Des intrus...

Mais il y a autre chose. Il y a eu un autre intrus dans sa forêt peu de temps avant, et il ne lui a pas du tout inspiré cette méfiance presque viscérale. Non, c'est différent. Les yeux dans le feu et les sourcils froncés, elle essaie de sonder son malaise, et n'en touche pas le fond...

- Je n'aime pas ça.

C'est idiot, dit comme ça. Mais il y a quelque chose qui la trouble profondément dans cette histoire, et elle n'arrive pas à savoir quoi. Peut-être que si elle avait une idée du morceau qu'ils voulaient faire cracher à leur proie, elle trouverait la raison. Mais Ivar ne lui dira certainement pas de quoi il s'agit, en admettant qu'il le sache.

Elle baille. Un bâillement vaste et impudique de félin.

Les jambes repliées de côté, elle se cale contre l'accoudoir du fauteuil de bois, et reprend une gorgée de cette bière, décidément trop douce... Et qui fait dire des choses un peu trop hardies, peut-être. Mais qui n'essaie rien...

- Ils cherchent quoi, au juste ? Vous avez enlevé la grand-mère de leur chef pour épaissir la soupe ?

Un sourire. Evidemment que c'est n'importe quoi. On dit à tous les enfants d'Eiralie que les Suéris mangent les gosses qui ne sont pas sages. Mais de la grand-mère, ça doit être coriace. Voire filandreux...

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Ivar Grimsson
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MessageSujet: Re: Le captif et la tête du mort   Le captif et la tête du mort Icon_minitimeSam 11 Déc 2010 - 16:50

Prévenir ton jarl...

Bonne idée, sauf que c'est impossible. Oh, bien sûr, il serait possible d'envoyer un navire. Un messager. Mais il est dangereux pour un homme de voyager seul sur l'onde. Un Suéri peut très bien être occis par d'autres Suéris. C'est d'ailleurs le cas le plus fréquent... le nombre de guerriers suéris qui a trouvé la mort face aux armées eiraliennes ou aux hordes lydanes est insignifiant comparé au nombre de ceux qui ont été tués par leurs voisins.
De plus, la mer est grande et un messager pourrait facilement rater sa cible et se trouver réduit à faire demi-tour sans avoir réussi sa mission. D'autant plus que Ragnar n'avait pas l'intention de s'éterniser à Yeravik. Il est fort possible qu'il soit déjà sur le chemin du retour.

Non, aucun moyen sûr. Je lui ferai mon rapport à mon retour. Je ne pense pas que ces gens l'attaquent sur mer. Ou alors ils le regretteront. En revanche, j'enverrai une escorte importante et je sécuriserai les lieux lorsqu'il mettra pied à terre.


L'idée effleure Ivar que Rowan pourrait s'avérer très utile pour ce genre de tâche. Mais... il ne sait pas assez d'elle pour lui confier des missions de ce genre. Sans compter qu'elle ferait probablement ce qu'elle veut de toute manière.

En revanche, il est sensible à l'inquiétude de Rowan. Bien qu'il ne la connaisse pas beaucoup, ou peut-être à cause de cela, il est enclin à faire confiance à l'instinct de la jeune femme.

En ce qui concerne les raisons qu'ils ont de nous en vouloir... Je ne peux pas trop t'en dire pour le moment. Il est juste que Ragnar soit le premier à connaître les éléments que j'ai en ma possession. Pour faire court, disons que l'Arc Blême est une compagnie de mercenaires. Ils n'ont rien contre nous, personnellement. C'est l'identité du commanditaire qui est importante. Mais, sans rentrer dans les détails, il semble que nous ayons détroussé la mauvaise personne... En revanche, après ce qui s'est passé cette nuit, je pense que cette mission va devenir pour eux une affaire personnelle. C'est toujours ce qui arrive lorsque des pertes surviennent.

Aucune trace de reproche dans la voix d'Ivar, simplement une constatation appuyée par l'expérience : les mercenaires et les soldats en général chassent en meutes, et le meurtre d'un d'entre eux soude généralement les survivants en un groupe armé désireux de se venger. C'est pourquoi, dans les affaires de luttes de clan, les Suéris mettent toujours un point d'honneur à exterminer tout le clan ennemi : hommes, femmes, enfants et vieillards.
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Rowan Altenberg

Rowan Altenberg


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MessageSujet: Re: Le captif et la tête du mort   Le captif et la tête du mort Icon_minitimeVen 17 Déc 2010 - 18:40

Evidemment, il sait, mais ne peut pas parler. C'est normal, sa loyauté va à son jarl avant tout, n'empêche que ça l'agace un peu. Oh, juste un peu. Elle est trop claquée pour être plus qu'un peu agacée de toute manière.

Ceci dit elle en apprend un peu quand même, même si elle soupçonnait la plupart de ce qu'il lui révèle. Des mercenaires, à la recherche d'un butin volé... Elle lève un sourcil à l'allusion d'Ivar sur les pertes et leurs conséquences, se demandant vaguement s'il ne serait pas en train de lui en faire le reproche de manière implicite. Mais il n'a pas la voix ni le regard de quelqu'un qui accuse. Encore heureux, elle l'aurait assez mal pris.

Elle baille encore, ses paupières sont douloureuses. Une lourdeur vaguement agréable a envahi ses membres et son esprit. Elle se rend compte qu'elle fixe les flammes du feu depuis un long moment, en silence, et se secoue un peu en se redressant dans le grand fauteuil sculpté. Pour se tenir éveillée, elle se tourne vers Ivar, et la question lui vient à l'improviste.

- Sais-tu quand ils doivent revenir ?

C'est a posteriori qu'elle se rend compte que c'est plus important pour elle qu'un simple moyen de poursuivre la conversation. Et ça l'ennuie un peu, à vrai dire. Elle a un léger froncement de sourcils, qu'elle masque dans la chope de bière.

Manquerait plus que cette grande brute lui manque, à présent. Ce serait le bouquet.
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Ivar Grimsson
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MessageSujet: Re: Le captif et la tête du mort   Le captif et la tête du mort Icon_minitimeLun 20 Déc 2010 - 22:31

Le poids des non-dits s'attarde un moment dans la pièce et assombrit l'ambiance. Brièvement. Mais le vieux guerrier comprend que Rowan ne lui tiendra pas rigueur de respecter son allégeance.

Si nos serments ne sont pas respectés, nous ne sommes rien.


Ivar passe pensivement ses doigts calleux dans la broussaille de sa barbe en réfléchissant à la question de Rowan. Une autre question à laquelle il doit répondre alors qu'il avait prévu d'y penser tranquillement. Et seul. Il se met à compter sur ses doigts.

Voyons... Deux jours dans le meilleur des cas, une semaine dans le pire. Plus, disons, une semaine sur place. Je connais Ragnar. Il aura à cœur de faire les choses vite et bien pour éviter que la peur de l'inconnu ne prenne le pas sur l'enthousiasme de son projet.

A moins qu'il décide de passer l'hiver au Nord pour retrouver ses racines tout en se laissant le temps de voir lesquels, parmi les gens de Yeravik, sont les plus solides pour la tâche qu'il envisage.

Ivar secoue brièvement la tête, se débarrassant de l'idée comme de mouches importunes. D'abord, Ragnar ne s'éloignera pas longtemps d'un domaine qu'il estime devoir gérer en personne. Ivar sait déjà, sans que le jarl le lui ait dit, que laisser la direction de Falr à un autre, surtout aussi tôt après que le domaine ait changé de propriétaire, est une belle preuve de confiance.
Ensuite, Ragnar ne décapitera pas volontairement Yeravik en le privant de tous ses habitants les plus courageux et audacieux. Ce ne serait pas correct, et livrerait Yeravik, à moyen terme, à la convoitise d'autres jarls. Les nouvelles circulent vite, très vite, même dans le Nord glacé.

Donc... si je calcule bien, son voyage durera au total de onze jours à trois semaines. Étant donné qu'il est parti voici une semaine... Je te laisse faire toi-même le calcul. Je ne sais pas exactement combien de temps il a prévu de rester à Yeravik. En fait, je soupçonne qu'il n'en savait rien lui-même. Mais ce que je sais, c'est qu'il ira assez vite, ne serait-ce que pour ne pas rester bloqué là-bas par l'hiver.


Le guerrier se lève pour venir face au feu, et s'y chauffer pensivement les mains, appréciant la chaleur du foyer dans cette salle que l'âtre n'a pas eu le temps de réchauffer après cette longue nuit.

Je vieillis. Si j'avais dix hivers de moins, je ne ressentirais pas le besoin de me réchauffer. Vingt de moins et j'aurais enlevé ma pelisse, je ferais les cent pas autour de la table pour lutter contre le froid. Et encore, il fait chaud, ici, comparé à Yeravik.


Je préparerai une escorte et ferai surveiller étroitement les environs lorsqu'il reviendra. En ce qui concerne tes actions de cette nuit...


Et soudain, avoir les yeux fixés dans le feu devient une bénédiction pour éviter de remercier la jeune femme. Lorsqu'il fait preuve de générosité, c'est toujours avec une certaine gêne, comme si c'était signe de faiblesse. Il devient alors paradoxalement plus ronchon. Ce que Ragnar lui a déjà fait remarquer, avec son franc-parler coutumier, ainsi que d'autres.

Je peux le lui raconter moi-même. Ou bien je t'envoie un messager quand la voile des navires sera en vue, afin que tu puisses lui raconter lui-même tes aventures, à condition que tu acceptes bien sûr de porter tes fesses de la forêt jusqu'à la citadelle ou à l'embarcadère. A toi de choisir.


C'est à elle que revient le mérite, à elle de raconter son histoire et d'en récolter les honneurs.


Bien sûr, Ivar raisonne en guerrier suéri, considérant naturel de vouloir raconter personnellement ses exploits, avec une feinte modestie, afin d'en tirer réputation et éventuellement, richesses. Car il ne fait aucun doute pour lui que Ragnar récompensera toute personne qui risque sa vie pour l'aider, lui et ses hommes. Même si, en l'occurrence, Rowan a réagi comme tout animal dont on empiète sur le territoire, il comprend qu'il y a autre chose, quelle que soit la nature de cet "autre chose".
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Rowan Altenberg

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MessageSujet: Re: Le captif et la tête du mort   Le captif et la tête du mort Icon_minitimeDim 26 Déc 2010 - 18:57

Elle fait le compte dans sa tête. Deux semaines, au pire.
Plus de deux semaines, c'est qu'il aurait eu un gros souci en route, ou là-bas.
Mais elle n'a pas envie de penser à cette éventualité-là.

La chasseresse est roulée en boule dans le grand fauteuil, la chope de bière entre les mains. Elle regarde le grand homme vieillissant debout devant la cheminée. L'homme de confiance de Ragnar. Un vieil ours qui peut encore étrangler son homme sans trop se forcer. Elle détaille sa carrure massive et la manière dont ses pieds l'assurent sur le sol dallé. Stable, solide. Elle a une sorte de manière spéciale de ressentir les gens, d'étudier leur allure, leur maintien, leur regard, même, mais le sait-elle seulement, l'odeur qu'ils dégagent. Il y a des gens qu'elle "sent" fiables, et Ivar en fait partie. Même si elle "sent" aussi quelque chose d'incertain en lui, de trouble. Peut-être qu'il s'inquiète pour Ragnar. Peut-être juste qu'il n'aime pas être un chef, et que ça le met mal à l'aise. En tout cas, il est loyal, ça elle en mettrait ses deux mains dans le feu.

Tandis qu'elle le regarde se réchauffer à la flambée, elle songe aux fois où cette sorte de talent bizarre lui a soufflé des choses que rien ne pouvait laisser supposer. Cet homme maigre que Rod avait installé dans une chambre en haut, qui s'était fait une sale entorse... Pendant qu'elle serrait un bandage sur sa cheville, il parlait et parlait, affable, gai, apparemment inoffensif. Mais il y avait quelque chose qui n'allait pas, sans qu'elle puisse le définir. Elle avait averti Rod, tellement ça l'avait troublée. Il n'avait rien dit, mais plus tard elle avait appris qu'il avait fait venir ses deux beaux-frères et plusieurs autres hommes, pour surveiller les issues, et vu un oiseau s'envoler de la fenêtre de l'homme. Une flèche et le message qu'il avait à la patte s'était retrouvé entre les mains de Rod, puis dans celles du vieux Bald, un des rares au village à savoir lire. C'était une description du village, et un croquis des murailles de la forteresse. L'homme à l'entorse avait été pendu. Une autre fois c'était un sentiment étrange, urgent, qui l'avait poussée hors de sa chaumière, armée de son arc. Elle n'avait eu à attendre que quelques minutes avant d'entendre la voix rauque du corbeau. Il volait plus maladroitement que d'habitude, à cause de la ficelle nouée à sa patte. Quatre jeunes hommes du village le suivaient. Leur chair morte avait nourri les loups et les ours, après qu'elle les ait traînés tous les quatre, loin au coeur des bois. Mais auparavant elle avait pris sa sacoche et était allée soigner la tête de Rod, assommé. La vieille Gerda lui avait appris que ces quatre gars étaient des nouveaux venus à la forteresse, descendus boire un coup. Elle s'était tenue loin du village pendant plusieurs mois par la suite, et personne n'avait plus reparlé de ces types.

Ivar ne se retourne pas en lui parlant ensuite de ce qu'il entend faire pour protéger Ragnar. Ni quand il lui suggère de rapporter ses "exploits" elle-même. La crudité de l'expression lui fait hausser un sourcil et se demander pourquoi il semble fâché, tout à coup. Quoique "fâché" ne convient pas vraiment. Difficile de trouver le bon mot. Et inutile, en fait.

- Non, c'est bon, ne perds pas ton temps à ça. Ton messager ne me trouverait pas, de toute manière. Par contre si tu revois de ces types bizarres rôder dans le coin, j'aimerais bien être prévenue. Ils sont habiles, j'ai failli les entendre trop tard. Pas envie de tomber entre leurs pattes, à entendre leur manière de traiter les filles. Et puis qui sait... je pourrais me rendre utile. Je crois que personne ne connaît les bois comme moi, ça peut servir.

Elle a un sourire un peu de travers, empli d'une malice étrange, un peu effrayante si on comprend qu'elle songe à la traque qu'elle a menée cette même nuit.

- Si tu préviens Rod, à l'auberge, il m'enverra le corbeau. Lui sait où me trouver.

Et elle baille à nouveau, tout grand.
Puis soupire, un grand soupir lourd de môme épuisé.
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Ivar Grimsson
Capitaine de navire
Ivar Grimsson


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MessageSujet: Re: Le captif et la tête du mort   Le captif et la tête du mort Icon_minitimeSam 1 Jan 2011 - 15:52

Ivar sent ses yeux se fermer. Il faudrait rapidement mettre fin à cette entrevue, car la fatigue de Rowan est si perceptible qu'elle en est quasiment contagieuse. Encore un peu plus et il est bon pour aller se recoucher. Néanmoins, il a un petit sourire au commentaire de Rowan. Tuer quelqu'un et le capturer vivant sont deux choses bien différentes. En ce qui concerne Rowan, la faire prisonnière semble pour le moins... difficilement réalisable. Mais Rowan n'est pas suérie, elle a peut-être d'autres projets qu'une mort glorieuse. Surtout qu'Ivar, dans toute sa longue existence, n'a jamais vu de manière glorieuse de mourir.

Reste un problème... à amener délicatement. Selon l'ego de la donzelle. Mais même Ragnar, dont Ivar est bien placé pour connaître l'immensité de l'orgueil, s'inclinerait devant l'évidence.

Tu as eu une nuit longue et fatigante. Si les mercenaires reviennent aujourd'hui, j'ai peur que tu ne sois pas en état de les combattre. Et il n'est pas exclu qu'ils reviennent, pour savoir ce qu'il est advenu de leurs hommes. Si tu le souhaites, tu peux rester dormir ici. Derrière nos murs, tu seras à l'abri pour te reposer.


Sois raisonnable...


Après quelques instants de réflexion, le verdict tombe.

Tu as raison. Mais juste pour cette fois alors. Je n'aime pas les murs.

Un léger sourire passe sur le visage d'Ivar, qui s'en était douté.

Ce n'est pas un problème. Je vais te faire préparer une pièce un peu à l'écart. Tu ne seras pas dérangée. Et peut-être même pas aperçue, si nous y allons tout de suite, quand la moitié de la maisonnée dort encore.

Un petit signe de tête, puis le guerrier se lève, avec une souplesse surprenante compte tenu de son âge et de l'heure de la journée.

Je vais te montrer le chemin. Si tu veux quelque chose, un bain, à manger ou quoi que ce soit d'autre, tu n'auras qu'à demander.

Les lois de l'hospitalité, toujours... Avec un traitement spécial pour les amis de la maison. Même si je serais fort étonné que tu demandes quoi que ce soit.


Ivar se met en route, espérant lui aussi qu'ils ne croisent personne. Il ne tient pas à devoir expliquer ce qu'il fait en se dirigeant vers une chambre avec une jouvencelle, ce qui le placerait, lui, Ragnar, et la jouvencelle en question, dans une position légèrement inconfortable.
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