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 Bain de sang pour les mercenaires

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Roland de Peyrefendre
Général protecteur de Rossburh

Roland de Peyrefendre


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MessageSujet: Bain de sang pour les mercenaires   Bain de sang pour les mercenaires Icon_minitimeJeu 22 Oct 2015 - 21:57

Note HRP :









Roland de Peyrefendre



An 165
35ème jour du Soleil (196ème jour)
Milieu d'après-midi
Rossburh



Le vent soufflait sur les remparts. C'était l'endroit où Roland se trouvait lorsqu'il accepta de recevoir un plaignant pour des doléances. Il fixait pensivement la forêt mystérieuse, hostile, menaçante, comme s'il pouvait lui arracher tous ses secrets par la simple force de son regard. Un bruit de pas le détourna de sa morbide contemplation.

Le marchand était maigre, chauve, nerveux. Le genre à devenir rapidement exaspérant pour le seigneur de Peyrefendre, lequel n'appréciait que les hommes stables et posés. Mais, en même temps, c'était un marchand réputé dans la région. Un de ceux dont la parole pesait lorsqu'il s'agissait de raconter à ses collègues si un seigneur avait bien rempli son obligation d'assurer la sécurité, et donc, pesait sur le commerce et la prospérité. Quand bien même ce n'aurait pas été le cas, si l'histoire qu'il racontait était vraie, il fallait agir.

Je comprends, maître Maurin. Donc, récapitulons. Les mercenaires de l'Hydre vous ont contraint à acheter du mobilier. Quoi, et pour combien ?

Le dénommé Maurin arborait l'expression de celui qui aurait préféré être n'importe où ailleurs, son crâne transpirait, mais sa voix était ferme.

Des assiettes, une fourche, quelques cuillères et louches en bois, une carafe en bronze, trois chaises pliantes....

Le seigneur Roland poussa un gémissement intérieur.

Foutus marchands.

L'homme avait parfaitement la mémoire et la cupidité nécessaire pour lui faire un inventaire complet. Quelqu'un de moins... conséquent, n'aurait jamais pu rencontrer Roland de Peyrefendre en personne. Mais comme c'était un marchand d'envergure, et que, qui plus est, l'Hydre était sous la responsabilité personnelle du Général Protecteur... C'était à lui de régler les problèmes relatifs à ces mercenaires. Pourtant, ils s'étaient avérés de quelque utilité, en ramenant des informations précieuses sur les Lydanes. Des informations qu'il fallait livrer à la Couronne de toute urgence. Si une nouvelle Guerre Sainte était en gestation... Mais pendant les préparatifs, voilà qu'on ennuyait de Peyrefendre avec ce genre de broutilles...

Ils m'ont pris trente eirals d'or, et cinq rubis. Chacun d'une valeur de quarante eirals d'or. A titre de préjudice, ils ont dit. Et ils m'ont menacé. Ma perte totale s'élève donc à précisément deux cent trente eirals d'or, sans compter le stock...

Avez-vous déduit le prix des marchandises ? Vous avez bien dû les revendre.

C'était de l'humour, mais étant donné que le visage de Peyrefendre était toujours d'une dureté granitique, il était difficile de s'en rendre compte. Le comte savait bien que le marchand mentait. Sans doute n'y avait-il que trois rubis d'une valeur de vingt eirals d'or chacun, et cinq pièces d'or, guère plus. L'homme marchandait, voilà tout. Mais Roland accepta le probable mensonge sans discuter. De toute manière, le paiement serait prélevé sur le butin de guerre après le massacre de l'Hydre.

Le seigneur hocha la tête.

Vos agresseurs seront châtiés. Et vous serez remboursé dès que possible.

Il se leva brusquement.

Je ne vous retiens pas.

Maître Maurin s'inclina et se retira. Aussitôt après, Roland de Peyrefendre se tourna vers un garde.

Faites venir à moi mon fils. J'ai une mission à lui confier.

Les mercenaires avaient mis longtemps à émerger de la forêt. On aurait pu espérer qu'ils y étaient morts, ce qui aurait grandement facilité l'exécution de la sentence. Mais puisque les Lydanes avaient salopé le boulot, on saurait s'en charger soi-même. Et puis, ça maintiendrait les hommes en forme.

L'Hydre avait mis en place son camp à l'est de Rossburh, en-dehors de la forêt, et attendait naïvement son paiement. Ça, oui, ils allaient être payés.

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MessageSujet: Re: Bain de sang pour les mercenaires   Bain de sang pour les mercenaires Icon_minitimeJeu 22 Oct 2015 - 21:59







Paul de Peyrefendre



Plaines de Grünmeer
2ème jour du Bœuf (209ème jour)
An 165
Début de l'heure du Bœuf (14h)


Le Général Protecteur par intérim releva la visière de son casque, passant en revue ses troupes. Les paroles qu'avait prononcées son père Roland juste avant de partir étaient on ne peut plus limpides.

Ça sent mauvais, Paul. Ça sent vraiment mauvais, en Lydanie. Je dois aller parler à... à la Couronne. Et toi, tu agiras et tiendras la région en mon nom jusqu'à mon retour. Tu vas commencer par tenir la promesse que j'ai faite à la Compagnie de l'Hydre. Le moindre incident était puni de mort. Maître Maurin a été victime d'extorsion. Je les ai prévenus. Pas de survivant. Et n'oublie pas de prendre des têtes, pour les mettre à l'entrée de la ville.

Et donc, Paul de Peyrefendre avait réuni 500 hommes, plus qu'il n'en fallait normalement pour vaincre la centaine de l'Hydre. Mais ils ne devaient pas simplement vaincre, ils devaient écraser et exterminer les mercenaires. Cela pourrait s'avérer compliqué, les mercenaires étant généralement, par définition, difficiles à tuer.

Il fit mentalement la liste des effectifs. Cent cavaliers (qui finiraient probablement par combattre au sol), deux cent fantassins, et deux cent archers. A vrai dire, c'était sur les archers qu'il comptait le plus. Une fois arrivés à portée, s'ils se montraient assez précis, ils pourraient empêcher toute résistance organisée. Parce que Paul, supériorité numérique ou pas, n'avait aucune intention d'envoyer ses cavaliers s'empaler sur les piques de l'Hydre. De plus, en rase campagne, l'arc était supérieur à l'arbalète, de par sa cadence de tir largement plus élevée. Les arbalètes se prêtaient mieux à la guerre de siège, ou au tir de précision plutôt que de masse. Le plan était donc le suivant : noyer les mercenaires sous un déluge de flèches. Dans l'idéal, obtenir une désorganisation, puis les charger. S'ils fuyaient, ce serait parfait. S'ils décidaient de faire une sortie, ce serait bien. S'ils décidaient de se dissimuler dans le camp, ce serait une lutte acharnée, pied à pied.

Les troupes de Peyrefendre arrivaient par le Nord. Paul donna un ordre pour ordonner qu'on envoie cinquante cavaliers au sud, en faisant un très large détour, et une cinquantaine de fantassins et archers à l'ouest. Un encerclement dans les règles de l'art, avec une attaque sur au moins trois fronts. Chaque corps assez important pour résister en cas de sortie jusqu'à ce qu'on vienne à son secours.

Une fois les ordres donnés, Paul fit ce que tout bon commandant savait faire après avoir donné ses ordres : il attendit. Le plan était simple : se déplacer séparément, frapper tous ensemble. La pratique pouvait être nettement plus compliquée, surtout s'ils avaient été repérés par l'Hydre.

Au pire, ils avaient toujours la supériorité numérique et le fait d'encercler l'ennemi, mais Paul prenait cette mission pour ce qu'elle était : un exercice de tactique en grandeur nature et avec un opposant des plus réalistes. Des soldats de métier endurcis et disciplinés. Ça changeait des guerriers lydanes, incapables de comprendre le concept même de "formation de combat".
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Guethenoc Ropartz

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MessageSujet: Re: Bain de sang pour les mercenaires   Bain de sang pour les mercenaires Icon_minitimeJeu 22 Oct 2015 - 22:02







Guethenoc Ropartz



Toute une existence à combattre pour de l'argent et à devoir se méfier des ennemis, des civils, des alliés non mercenaires qui méprisaient ces derniers, ainsi que des autres compagnies de mercenaires, voire même parfois de ses propres frères d'armes, c'était un mode de vie qui aiguisait les instincts.

Peut-être était-ce quelque chose dans l'air, ou l'écho lointain d'un hennissement, mais tout le monde sut instantanément qu'il y avait un problème. Chose inhabituelle, la très grande majorité des soldats était parfaitement sobre, ce qui n'était pas forcément pour les tranquilliser, mais améliorait considérablement leur sens de la discipline.

Guethenoc Ropartz, alias Maximilien Lergot, posa sa tête au sol, ferma les yeux quelques instants, et les rouvrit.

Bordel de m... Des cavaliers. Par le Nord. A tous les coups, c'est c't'enfoiré d'comte qui veut pas nous payer. Branl'bas d'combat !

Il avait gueulé à pleins poumons la dernière phrase, mais déjà, autour de lui, on s'agitait. Des armures étaient revêtues, des armes récupérées sur des râteliers, des carquois remplis, des carreaux d'arbalète plantés en terre. Ce n'était pas la première fois qu'un débiteur indélicat tentait ce genre de coup, en général, c'était l'occasion idéale de renégocier à la hausse le prix de la mission. En revanche, c'était bien la première fois qu'un comte leur faisait ce coup-là. Combien Peyrefendre avait-il d'hommes ? Mille soldats de métier ? Deux mille ? Quelque chose dans ce goût-là... Et on ne comptait même pas ses barons ou les miliciens. Peyrefendre avait un mépris notoire pour des glaiseux entraînés au combat en dix jours avant de retourner cultiver leurs champs. Il était plus que probable que sa troupe ne comptait que des soldats de métier. Moins nombreux, mais une cohésion redoutable.

En un temps record qui aurait fait l'admiration du seigneur Roland s'il avait été là pour le voir, une troupe de piquiers était en place à l'ouverture nord de la palissade, avec des arbalétriers prêts à tirer entre les pieux qui constituaient le mur, tandis qu'une force d'observation se plaçait au sud et une autre à l'ouest, où il n'y avait pas réellement de porte, mais où le terrain, meuble, rendait la palissade peu digne de confiance. Et comme Roland, en bon soldat, avait des éclaireurs qui étaient venus jeter un œil au camp, il le savait forcément. Bon sang ! Si on avait su, on leur aurait collé un ou deux carreaux d'arbalète dans le derche, histoire de les détendre un peu.
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MessageSujet: Re: Bain de sang pour les mercenaires   Bain de sang pour les mercenaires Icon_minitimeJeu 22 Oct 2015 - 22:06







Paul de Peyrefendre

Le jeune fils de comte avait été bien formé. Il était celui que son père voyait pour lui succéder, et toute son enfance avait été peuplée de cours de tactique, de récits de batailles, qui plus est parfois par ceux-là mêmes qui les avaient vécues. Son expérience de la guerre était supérieure à celle dont il disposait personnellement : d'une certaine manière, il véhiculait la sagesse et le sens de la guerre de toute une lignée, et non des moindres. Il vit immédiatement que tout espoir d'attaque surprise pouvait être abandonné. Le camp était gardé, des piquiers en formation serrée déjà prêts à recevoir tout assaut frontal. Autant la cavalerie était une arme puissante pour obtenir la rupture, autant elle ne fonctionnait que par la peur qu'elle inspirait. Si une formation de piquiers fermement résolue à demeurer sur place se faisait charger, elle restait sur place. Heureusement, même si la cavalerie de Peyrefendre était légendaire, ils avaient d'autres recours que de simplement charger tout droit à dos de cheval.

Les archers tiraient plus vite que les arbalétriers. Certes, ils étaient moins bien protégés, mais ils avaient l'avantage du nombre, et de l'encerclement. Un des premiers principes, très connu en guerre de siège, était celui de la supériorité des tirs convergents sur les tirs divergents. L'armée au centre offrait une plus grande densité de cibles à toucher. Et, dans le cas présent, un camp était généralement fait de tentes, qui étaient très inflammables. Quand l'assaut final serait lancé, plus il y aurait de mercenaires occupés à éteindre les foyers d'incendie, et moins les troupes du Kevalis auraient à subir de pertes.

Pendant que les cavaliers mettaient pied à terre et commençaient à marteler leurs boucliers de leurs haches et épées dans un martèlement sinistre, les archers commencèrent à tirer. De la lumière vint du ciel, mais ce n'était pas le soleil, car le ciel commençait plutôt à se couvrir. Dans deux ou trois heures, l'orage éclaterait. Juste à temps pour nettoyer le sang une fois que l'affaire serait conclue, si tout se passait conformément aux recommandations des Astres.

Cette lumière venait des flèches enflammées qui retombaient sur la palissade, dans la boue, sur les tentes, ricochaient sur des armures, ou, rarement, pénétraient dans la chair.

En réponse, le vrombissement des carreaux d'arbalète, son moins fréquent, mais aux tonalités nettement plus sombres, retentit. Des chevaux hennirent, des hommes tombèrent. Certains se relevèrent, d'autres non.

Evidemment, ce n'était qu'un début. Paul de Peyrefendre savait bien que les flèches ne décidaient jamais à elles seules du sort d'une bataille. Elles attendrissaient la viande mais il fallait toujours terminer par un choc décisif pour réellement détruire un ennemi résolu. Surtout s'il était fortifié. Cela dit, les échanges de tirs donneraient déjà le ton de la suite de la bataille.

L'air de rien, Paul de Peyrefendre recula derrière ses hommes. Ils n'attendaient de toute manière pas de lui qu'il se tienne en première ligne, conscients qu'il leur servait mieux à l'arrière qu'à risquer sa vie inutilement.
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MessageSujet: Re: Bain de sang pour les mercenaires   Bain de sang pour les mercenaires Icon_minitimeJeu 22 Oct 2015 - 22:07







Guethenoc Ropartz



Par les nichons d'la reine, foutez-vous à couvert !

C'était mal parti. Les arbalétriers, s'abritant du mieux qu'ils pouvaient, ripostaient vaillamment, mais ils étaient une trentaine, quand, en face, ils avaient deux cent archers. Ça voulait dire qu'en gros... ouais, en gros, dans le temps qu'on leur tirait un projectile, eux, ils en tiraient... euh. Plus. Rien à foutre. C'était pas le moment de sortir les bouliers. Guethenoc se tourna vers la palissade, qui commençait à cramer méchamment. Quelques gars motivés balançaient de l'eau dessus, mais c'était peine perdue, il le voyait bien.

Le chef mercenaire poussa un juron horrible. Il fallait commencer à se tirer de là. A vue de pif, il avait une dizaine d'hommes hors d'état de combattre, encore une vingtaine qui ne faisaient plus rien d'autre que baisser la tête en priant qu'une flèche ne vienne pas se planter dedans. Et c'était compter sans ceux qui devaient essayer d'éteindre les flammes.

Impossible de dire combien des gars de Peyrefendre ils avaient descendu. Guethenoc en avait vu tomber certains, mais pas assez. Le problème était que, de toute manière, Guethenoc, comme ses hommes, se foutait bien de savoir combien d'ennemis il avait tué. Les mercenaires étaient des gens pragmatiques, pour qui une bataille gagnée était une bataille qu'on terminait vivant, et avec les poches pleines. Il prit une décision. C'était idiot... Mais, ouais, ça pouvait marcher.

Toi, toi, toi, toi et toi. Vous avez des haches. Commencez à abattre le mur à l'Est. On va se barrer par là.

C'était pure folie, bien sûr. La forêt lydane était tout ce qui les attendait, et quand bien même, fuir devant le cheval était illusoire. Les pillards lydanes qui l'avaient découvert à leurs dépens ne se comptaient plus, mais, de temps en temps, leurs os bloquaient les socs de charrue des paysans. C'était le moment pour un discours de motivation. Guethenoc sauta sur un tonneau, ignorant les flèches qui sifflaient autour de lui.

Bon, les gars. Je vais pas vous mentir. On risque de tous y rester. Cet enfoiré de comte nous a trahi. Il veut pas nous payer, alors il essaye d'nous buter. Mais c'est pas l'premier à essayer. Des brigands, des Suéris, des Lydanes, des troupes de nobles du même genre ont essayé, et on est toujours là alors qu'eux, ils nourrissent les asticots.

Brève pause. L'attention des hommes était captée. Maintenant, il fallait les exalter.

Ils croient qu'on va fuir devant eux. C'est c'que font toujours les Lydanes, et c'est pour ça qu'les gens d'Peyrefendre sont à cheval : pour massacrer des fuyards. On va voir c'qu'ils valent contre des gars qui leur montrent pas leur cul, mais leur trogne. Z'en dites quoi ?

Quelques cris d'approbation s'élevèrent. Pas assez. La moitié des gars semblait remontée et prête à se battre tandis que l'autre semblait plutôt prête à souiller ses chausses.

Pour l'pognon, on verra plus tard à l'récupérer. Pour ça, faut survivre. Pour ça, faut s'barrer. Et donc, faut des chevaux. Nous, on en a pas, mais eux, ils ont l'cul d'ssus. Alors voilà c'que j'propose. On fait une sortie, bien soudés, comme on a l'habitude. On leur rentre dedans avant qu'ils aient l'temps d'piger qu'on va pas fuir. On prend les chevaux, et on file, direction l'est, direction la forêt. Après, on avisera. Des questions ?

Il n'y en avait pas. Alors, sautant de sa tribune improvisée, Guethenoc Ropartz prit place dans la formation qui se rassemblait en triangle, exactement au moment où la palissade à l'est tombait sous les coups de hache des gars qu'il avait envoyés s'occuper du sujet.
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MessageSujet: Re: Bain de sang pour les mercenaires   Bain de sang pour les mercenaires Icon_minitimeJeu 22 Oct 2015 - 22:08







Paul de Peyrefendre

Paul de Peyrefendre s'assura que sa bannière était bien levée. Un vent vigoureux venait du Nord, apportant un orage des montagnes, et faisait claquer l'oriflamme au cheval et à la tour de la famille Peyrefendre. Les armures de la compagnie de l'Hydre scintillaient et étincelaient, cependant qu'ils se mettaient en formation et en route d'un pas décidé. L'officier à côté du jeune noble émit un petit sifflement appréciateur en voyant les mercenaires charger une troupe trois fois plus conséquente qu'eux. Paul lui jeta un regard noir, puis donna l'ordre à la cavalerie de mettre pied à terre. C'était une tactique risquée, il en était conscient. Mais la cavalerie était en première ligne, la faire reculer pourrait donner l'impression aux autres corps qu'ils fuyaient le champ de bataille. Des combats pourtant bien engagés avaient déjà capoté pour bien moins que ça.

Maintenant, c'était un pari. Soit la cavalerie parvenait à enfoncer la formation de piquiers ou à tenir le temps que leurs alliés tombent sur les flancs de l'Hydre, et la victoire serait totale. Soit elle cédait et il faudrait faire donner l'infanterie, ce serait une mêlée sanglante assortie de pertes conséquentes.

Les cavaliers de Peyrefendre étaient plus habitués à combattre à cheval qu'à pied, et leurs bottes étaient mieux conçues pour s'emboîter dans des étriers afin d'encaisser l'impact d'un homme empalé par une lance. D'un autre côté, ils étaient habitués à combattre ensemble, soudés par un puissant esprit de corps, en supériorité numérique, et appuyés par des archers déployés sur leurs flancs.

Avec une compétence remarquable, ils se mirent en formation, laissant tomber leurs lances de cavalerie au profit d'épées, de haches, et de masses d'armes. Le plus dur serait de trouver une faille dans la formation serrée de l'Hydre. Qu'elle reste en place et ils tomberaient. Si une faille se formait, alors là, ils seraient comme aigles parmi les pigeons.

Les archers tirèrent sans discontinuer cependant que l'Hydre approchait au pas de charge. Des hommes tombèrent, d'autant que les arbalétriers ne pouvaient pas recharger en avançant, et tiraient sans précision. Cependant, peut-être sous l'effet du vent, les archers de Peyrefendre ne faisaient guère mieux, et peu de mercenaires tombèrent sous leurs traits avant d'arriver au contact.

D'un pas décidé, l'Hydre avança, jusqu'à ce que les premiers claquements de métal contre le bois, et les premiers grincements de fer torturé annoncent le début du corps-à-corps. Des piques s'enfoncèrent dans de la chair, des pièces d'armure furent enfoncées, furent transpercées. Le sang coula à flot. Des blessés gémissaient. Ceux qui tombaient à terre sous l'effet de la douleur ou de la faiblesse étaient immédiatement achevés. L'herbe commença à rougir.

Quelque part, au centre de la première ligne, un soldat brisa une pointe de pique d'un coup précis de sa masse d'arme. Il y eut un instant de frôlement. Et, très rapidement, une faille s'ouvrit dans les rangs de l'Hydre. Les cavaliers de Peyrefendre s'engouffrèrent dans la brèche. En quelques instants, la belle formation de l'Hydre n'était plus qu'un lointain souvenir.

Des mercenaires tombèrent en hurlant. Des crânes furent fendus, des membres tranchés. Et chaque mercenaire fut passé au fil de l'épée. Du moins, l'ost du Kevalis semblait-il bien parti pour cela.
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MessageSujet: Re: Bain de sang pour les mercenaires   Bain de sang pour les mercenaires Icon_minitimeJeu 22 Oct 2015 - 22:09







Guethenoc Ropartz



Ça semblait bien se passer, au début. Enfin, le moins mal possible vu les circonstances. L'Hydre était encerclée par des forces largement supérieures en nombre, mais les gars avaient compris qu'ils jouaient leur vie ici, ils avançaient bien soudés, ensemble, vers l'ennemi. Les archers du Kevalis s'étaient pas mal chiés en ratant presque systématiquement leurs cibles, ce qui n'était pas plus mal vu qu'un arbalétrier ne pouvait décemment pas tirer en marchant.

A ce moment, bien sûr, les choses avaient déjà commencé à se corser vu que les cavaliers étaient à pied avec leurs chevaux derrière eux. Mais on pouvait encore espérer les disperser, profiter de la confusion pour se frayer un chemin jusqu'aux chevaux. Au moins quelques-uns auraient pu prendre une monture, et tracer... peu importait où. N'importe quel endroit valait mieux que celui-ci.

Groupés ! On reste groupés !

Guethenoc gueulait ses ordres à pleins poumons, pas tant pour leur utilité - les gars savaient ce qu'ils avaient à faire - mais plutôt pour stimuler la combativité de ses hommes. Très vite, ce fut le contact. Guethenoc put le sentir, physiquement, les pieds qui glissaient dans l'herbe pendant que chaque formation avançait l'une contre l'autre. Il était impossible de fuir, du moins pour ceux de devant. Aussi la voix du chef de l'Hydre s'adressait-elle autant voire plus aux derniers rangs qu'aux premiers.

Poussez ! Poussez ! Butez-les ! Saignez-les !

Un cri de détresse non loin devant lui. Il sentit le flottement dans la formation alors qu'elle commençait à se déliter.

Restez soudés !

Mais Guethenoc s'époumonait en vain. Les rangs s'étaient débandés, et, sans bien comprendre comment, Guethenoc se retrouva en première ligne alors que ses hommes mouraient tout autour de lui. Le premier homme à se présenter était un vétéran grisonnant qui piqua de son épée au visage du chef mercenaire. Celui-ci baissa la tête, et la lame ricocha sur son casque. Il entreprit de frapper sauvagement sur le soldat du comte, avec dans l'idée d'en crever au moins un.

Bande de bâtards, cracha-t-il. Allez vous faire mettre, vous et votre salaud d'comte !

Il se sentait trahi, et n'envisageait bien sûr pas un seul instant que Roland de Peyrefendre ne faisait que tenir sa promesse d'occire toute la compagnie si elle semait le trouble dans la région. Ce qui avait été fait à peine deux jours après leur arrivée, avec le racket d'un marchand.

Il frappa une fois encore, mais partout, son épée ne trouvait que le bouclier du cavalier face à lui. Un mouvement un peu trop large donna le temps à son adversaire de le frapper, et il vit, hébété, son épée voler dans les airs, sa main encore crispée dessus. Il regarda, avec plus de surprise que de douleur, son moignon d'avant-bras. L'épée de l'homme de Peyrefendre se releva, et s'abattit.

Guethenoc était par terre, incapable de se relever. Une grosse botte de cavalier vint s'approcher, se poser juste à côté de son visage. Il tenta de se relever, de se tourner, en vain. Il avait froid, et se sentait faible. Il ne sentait plus ni ses mains, ni ses pieds. Il ne vit pas la lourde botte se relever, retomber avec force. Il ne sentit pas son crâne s'écraser.


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