Les finances publiques et l'impôt
Comme tout État, l'Eiralie a besoin d'argent pour fonctionner, et cet argent est obtenu via l'impôt. Celui-ci est prélevé directement sur les récoltes ou les revenus. La Maison Higden a toujours été, historiquement, une Maison d'administrateurs, et elle a donc mis au point un système de gestion relativement simple et efficace.
Il est bien sûr tentant de mentir sur ses revenus réels, mais refuser de payer l'impôt est considéré comme une trahison envers son seigneur, et ceux-ci ne se montrent guère tolérants. C'est une raison suffisante pour se retrouver branché à un arbre ou enfermé dans une cage à corbeaux jusqu'à ce que mort s'ensuive, aussi les gens se montrent-ils remarquablement honnêtes en règle générale. D'autant que dans les petites communautés, tout le monde sait plus ou moins qui gagne combien. Un contribuable avisé préférera donc payer un petit peu trop que prendre le risque d'une entrevue désagréable avec son seigneur suite à la dénonciation d'un voisin.
Par ailleurs, la majorité des roturiers ne possède pas l'habitation dans laquelle ils vivent, ils ne font qu'en jouir tant qu'ils servent loyalement leur seigneur. En effet, la plus grande partie des bâtiments et propriétés foncières est aux mains de la noblesse (qui fait tout ce qui est nécessaire pour conserver cette mainmise), et il est donc plus que déconseillé de rechigner à payer, si l'on veut avoir encore un toit sur sa tête à l'heure où l'hiver avance.
Les agriculteurs ne sont pas traités sur le même plan que les autres, face à l'impôt, et ce pour une raison simple : sur cinq grains récoltés, ils sont contraints d'en replanter un pour ensemencer le champ pour l'année suivante. De même, tout le bétail ne peut être abattu ou vendu si l'on espère poursuivre l'élevage. Ils paient donc un impôt plus faible.
Les métayers et les propriétaires fonciers
Bien que le système de la demeure gracieusement accordée en échange de la fidélité de ses habitants soit majoritaire, certains louent à leur seigneur leur maison et les champs qui en dépendent : ce sont les métayers.
Ils représentent une plus ou moins grande partie de la population, et véhiculent une image différente selon les régions et le seigneur. Certaines régions sont peuplées d'une fraction non négligeable de métayers, par exemple, l'Acrogée, et surtout, le Slianathaír (où presque la moitié de la population a ce statut). Il s'agit là de régions dont les ressortissants sont dotés d'une certaine culture de la débrouille qui se tournent assez peu vers leur seigneur pour résoudre leurs problèmes, comptant plus volontiers sur les relations et les liens familiaux.
D'autres régions ont une culture très interventionniste, souvent parce que l'aide du seigneur est nécessaire pour "lisser" les effets des aléas de la guerre et des aléas climatiques. Dans ces régions, quasiment toutes les demeures sont gracieusement accordées en échange de la fidélité de leurs habitants, et ceux qui insisteraient pour louer une demeure seraient regardés d'un air suspicieux, car cela jetterait le doute sur leur loyauté. Pourquoi quelqu'un dont la fidélité est indiscutable voudrait-il payer quelque chose qu'il pourrait obtenir gratuitement ? C'est le cas de l'Ismeerlane, de l'est des Méridianes (les Tannebuis ne desserrent pas facilement leur emprise sur la terre), et surtout, surtout, du Kevalis, où les incessantes attaques lydanes et les dégâts catastrophiques des intempéries (rares, mais destructrices dans une région comptant principalement sur l'agriculture) ont appris aux gens à prendre une assurance auprès de leur seigneur, en échange d'impôts plus élevés. Moyennant quoi, si leur demeure est brûlée, ce n'est pas à eux de la reconstruire.
Entre ces opposés, la ligne médiane est tenue par l'Avranie et la région occidentale des Terres Méridianes.
Par ailleurs, une minorité très faible de roturiers possèdent une demeure qui leur appartient en propre. Ils sont généralement vus comme des notables, et considérablement plus riches que la moyenne : érudits, artisans de grand renom, marchands opulents.... En revanche, il presque impossible pour des roturiers, aussi riches et prestigieux soient-ils, de posséder des étendues significatives de terres en-dehors de leur demeure. La noblesse tient à conserver le monopole de ce privilège car la terre, c'est la richesse. Rien que construire la maison est complexe, et nécessite des relations : une maison doit bien être bâtie sur un terrain, et ledit terrain.... acheté à un noble.
Le devoir militaire étant normalement le prix à payer pour jouir d'une demeure gratuitement, métayers et propriétaires terriens en sont en général dispensés. Ce qui n'est pas sans poser quelques problèmes, notamment dans le Slianathaír, où la moitié des habitants considère qu'ils n'ont pas à répondre à l'appel de leur seigneur s'il convoque le ban puisque après tout, ils payent leur maison, non ? A ce moment, ledit seigneur a le choix entre invoquer les vieilles relations claniques entre la grand-mère du soldat récalcitrant et l'arrière-grand-oncle de son capitaine des gardes, froncer les sourcils en dégainant à demi son épée (choix impopulaire, mais efficace à court terme), ou redistribuer l'argent payé par les métayers sous forme de salaire tant qu'ils se trouvent sous les armes (ce qui est souvent le choix retenu).
En règle générale, le système des métairies complique considérablement le recrutement, mais certaines traditions ont la vie dure et les gens du coin semblent s'en accommoder.
Cependant, même dans des régions comme l'Ismeerlane et le Kevalis, qui préfèrent, pour des raisons évidentes, conserver un système dans lequel le recrutement militaire est rapide et indiscutable, il est historiquement arrivé d'avoir de grandes populations de métayers. Il y eut récemment le cas de seigneurs louant temporairement leurs terres à certains de leurs sujets, à charge pour eux d'embaucher des saisonniers pour travailler la terre et la faire fructifier. Cette solution est généralement adoptée après une brusque chute de population (après une guerre, ou des épidémies...), pour éviter de laisser des terres en friche, et attirer des bras travailleurs. Cette solution est cependant toujours temporaire : dans les dernières décennies, on trouvait énormément de métayers dans le Kevalis, suite aux deux Guerres Saintes, mais aujourd'hui, on est plus ou moins revenu à l'état antérieur, avec des seigneurs possédant la terre et l'attribuant comme faveur, selon leur bon plaisir.
De l'autre côté, même dans les régions où les seigneurs sont les plus libéraux à ce niveau, il n'y a presque aucun métayer dans les grandes villes : le loyer serait bien trop élevé.
La collecte des impôts
De manière générale, les taxes sont récoltées lors de la seconde moitié de la période du Boeuf, donc juste après les moissons.
Une partie, fixe, est destinée à la Couronne. Une autre, variable selon la politique du seigneur local, lui est destinée. Les impôts sont payés en monnaie, mais plus souvent en nature, tenant compte de la grande proportion d'agriculteurs qui paient en céréales ou en bétail. Comme dit plus haut, les agriculteurs, grande majorité de la population, paient proportionnellement moins d'impôts que les autres.
Mercenaires et marchands ambulants paient l'impôt au seigneur chez qui ils se trouvent au moment de la levée d'impôts, et reçoivent un sauf-conduit cacheté et signé attestant qu'ils se sont acquittés de leur devoir.
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Ce qui soit dit en passant donne lieu à pas mal d'arrangements entre petits seigneurs et riches marchands ambulants, pour leur offrir des taux intéressants en tant qu'offre spéciale à condition qu'ils paient l'impôt à eux, et surtout pas au bâtard d'à côté, celui dont les hommes viennent sciemment couper du bois dans cette forêt qui ne leur appartient pas.
Cette configuration incite aussi les troupes de mercenaires à chercher à aller chez le plus petit seigneur possible, qui, ayant moitié moins d'hommes, n'osera pas aller réclamer l'impôt. C'est pari intelligent, à condition d'arriver à décamper rapidement lorsque le convoi du suzerain dudit seigneur vient et demande au passage à voir le fameux sauf-conduit. Les troupes de mercenaires ne sont pas très appréciées, et en général, les soldats en nette supériorité numérique sont plus qu'enthousiastes à l'idée d'égayer leur fastidieux voyage vers la capitale par quelques combats et pillages faciles. Une troupe de mercenaires sans sauf-conduit est l'archétype de la cible idéale dans ce cadre, puisqu'ils sont déjà en situation d'illégalité.
Quant aux soldats de métier et autres hommes d'armes, on considère qu'ils paient l'impôt du sang, aussi n'y sont-ils pas assujettis.
Les seigneurs fixent librement leur taux d'imposition à l'intérieur de certaines normes : ceux qui pratiquent des taux plus hauts se servent généralement de l'argent pour financer des œuvres de charité pour les blessés, les familles de leurs soldats tombés au champ d'honneur, les pauvres, ou les personnes âgées, ou encore pour faire des réserves disponibles en cas de disette. Du moins d'après leurs dires... Certains le font effectivement, d'autres non.
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Les chiffres (pour les maniaques du background et autres passionnés de comptabilité)
Taux d'imposition pour un paysan :20% de la récolte sert à ensemencer le champ, idem pour le bétail. Sur les 80% restants, il lui est prélevé :
-5% pour les taxes royales
-de 15 à 25% pour les taxes seigneuriales selon la politique du seigneur en place(dont il faut déduire le montant du loyer pour ceux qui louent leur demeure)
Total 20 à 30%
Taux d'imposition pour les autres professions :-9% pour les taxes royales
-27 à 45% pour les taxes seigneuriales selon la politique du seigneur en place (dont il faut déduire le montant du loyer pour ceux qui louent leur demeure)
Total 36 à 54 %
Chaque année, impôts et loyers inclus, un comte collecte en moyenne 350 000 eirals d'or pour la Couronne et 1 400 000 pour lui-même, en espèces ou en nature.
Chaque année, impôts et loyers inclus, un baron collecte en moyenne 55 000 eirals d'or pour la Couronne et 215 000 pour lui-même, en espèces ou en nature.
Chaque année, impôts et loyers inclus, un châtelain collecte en moyenne 5250 eirals d'or pour la Couronne et 21 000 pour lui-même, en espèces ou en nature.
Même si ces sommes peuvent sembler importantes, il convient de garder à l'esprit qu'une très grande partie de cet argent sert à financer les troupes et garnisons ou l'entretien des routes et édifices importants sur le territoire du seigneur qui collecte les taxes.
Convoyage des taxes
Comme les sommes transportées sont importantes, elles éveillent forcément la convoitise des bandits et autres malfrats. Or, comme la plupart des châtelains n'ont pas les effectifs suffisants pour défendre efficacement leurs convois, un arrangement a été trouvé et s'est transformé en coutume : le baron envoie des hommes à la demeure de ses vassaux pour récupérer l'argent, et ceux-ci joignent au convoi leur escorte en même temps que leur dû.
Une fois l'argent chez les barons, le comte envoie lui aussi ses hommes pour récupérer l'argent desdits barons, les uns après les autres, et les escortes et les convois se joignent à la procession avant de se réunir à la demeure du compte en vue du départ pour Falyse. Pour finir, c'est un immense convoi de bétail, d'argent, de marchandises diverses et variées, qui s'ébranle vers la capitale, escorté par des hommes au service de dizaines de châtelains, barons ainsi que du comte.
En échange de ce service, il est de coutume pour les petits seigneurs de payer une petite somme à leur suzerain, ou de lui offrir des cadeaux (dans de rares cas, le suzerain peut rendre ce service gratuitement, mais c'est peu fréquent).
Il est bien sûr possible de décider d'envoyer le convoi soi-même à Falyse, sans recourir à l'aide de son seigneur lige, mais c'est déconseillé : d'une part, celui-ci pourrait prendre comme une insulte cette entorse à la tradition, d'autre part, un convoi escorté par dix hommes transportant 4000 pièces d'or est beaucoup plus sujet à des attaques qu'un convoi escorté par 1000 hommes transportant 400 000 pièces d'or. Par ailleurs pour les habitants des Méridianes, des rumeurs persistantes laissent entendre que tous les vassaux directs ou indirects du comte de Tannebuis, qui auraient refusé d'avoir recours à son aide, ont vu leurs convois attaqués, et parfois même leurs villages ou leur demeure.