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 [fic] Daedra

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Trystan d'Artelion
Gardien de la Reine
Trystan d'Artelion


Messages : 275

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MessageSujet: [fic] Daedra   [fic] Daedra Icon_minitimeVen 6 Déc 2013 - 2:29

Après quelques hésitations, j'ai fini par me décider.

Voilà donc le début de ma fiction se déroulant dans l'univers de The Elder Schrolls.

Attention, il y a des spoilers.







Devant un vaste amphithéâtre d'élèves, Brelyna se força à respirer calmement.

L'elfe noir avait toujours un peu d'appréhension avant de commencer un cours. Malgré toutes les années qu'elle avait passées à enseigner la magie à l'Académie de Fordhiver, malgré le fait qu'elle était devenue une véritable référence pour tout ce qui touchait à l'art de la conjuration, elle éprouvait toujours cette sensation étrange d'angoisse qui la tiraillait juste avant de prendre la parole. C'était un petit peu comme si elle était actrice. Elle avait le trac avant d'entrer en scène, peur d'oublier son texte ou de s’emmêler dans les dates et les événements historiques.

Mais au final, une fois lancée, tout se passait à merveille.

« Un peu de silence je vous prie. »

Les étudiants ne l'écoutaient pas. Ils étaient toujours debout, retournés, ils continuaient à discuter avec leurs voisins sans paraître se préoccuper une seule seconde de leur professeur. C'était assez dérangeant, il fallait bien l'avouer. Certains professeurs se fichaient totalement qu'ils soient écoutés ou non. Les résultats de fin d'année permettraient à l'Académie de faire la différence entre le bon grain et l’ivraie.

Brelyna n'était pas ce genre d'enseignant. Lorsqu'elle débutait son cours, elle voulait être entendue. Elle voulait que ses élèves soient attentifs. Au diable en fait s'ils n'écoutaient rien, c'était leur problème. Mais elle voulait qu'ils aient au moins la décence de faire semblant.

« Asseyez-vous à vos places et un peu de silence je vous prie. »

Même si elle avait parlé un peu plus fort, cela n’eut pratiquement aucun effet. Quelques élèves au premier rang se mirent sagement assis, mais le volume sonore était encore bien trop élevé au goût de la dunmer.
Énervée par le comportement de ses élèves, Brelyna saisit son bâton de mage et le frappa violemment au sol, déclenchant dans amphithéâtre un épouvantable fracas qui se répercuta en échos sur les murs et fit taire toutes les conversations.

« Maintenant assis et bouclez-la, s'énerva-t-elle. »

Les élèves prirent sagement leurs places et restèrent silencieux en attendant que débute le cours. C'est une chose d'agacer un peu un professeur pour s'amuser. C'en est une autre de risquer d'encourir la colère de la plus grande spécialiste de la magie de conjuration de tout Tamriel. Ce n'est pas le genre de choses que l'on fait si on ne tient pas à visiter de plus près les profondeurs de l'Oblivion.

« Bien, commença la dunmer en reposant son bâton de mage. Aujourd'hui, nous allons étudier les événements qui se sont déroulé à la fin de la quatrième ère. Notre leçon portera plus particulièrement sur la révolte d'Ulfric Sombrage et ce qui a suivi celle-ci. »

Un sujet qu'il était bien ambitieux de traiter étant donné les ramifications politique complexes qui avaient mené à cette révolte.

« Commençons par le début. Quelqu'un ici peu me dire qui était Ulfric Sombrage ? »

Un Khajiit au pelage roux au troisième rang leva la main la première. Brelyna se demanda comment elle avait fini par arriver ici. Les chat humanoïdes de la province d'Elsewyr étaient vassaux des elfes du Domaine Aldmeri et on ne pouvait pas vraiment dire que les relations entre l'Empire et le Domaine étaient des plus amicales en ce moment.

« Je vous écoute. »

Prenant une inspiration, la Khajiit commença à parler.

« Ulfric Sombrage était le Jarl de Vendeaume. Il régnait sur la terre d'Estemarche en Bordeciel. »

C'était le minimum syndical de ce que l'on pouvait dire sur Ulfric Sombrage, mais il était tout de même bon de rappeler que ce personnage des plus controversés était avant tout un roi et non un simple brigand comme certains le prétendaient.

« En effet, reprit Brelyna. Ulfric Sombrage régnait sur l'une des plus puissantes et des plus prestigieuses cités de Bordeciel. Il a également pris part au conflit sanglant resté dans l'Histoire sous le nom de Grande guerre qui a opposé le gouvernement humain impérial aux elfes du Domaine Aldmeri. Mais malgré de lourdes pertes des deux côtés, le Domaine est sorti vainqueur de ce conflit. Maintenant, dites-moi. Qu'est-ce qui a amené Ulfric jusque-là loyal vassal de l'Empire à entrer en rébellion ? »

Un silence complet se fit dans la salle. Les connaissances historiques de ces jeunes gens étaient quelque peu limitées. D'un autre côté, le conflit qui avait opposé l'Empire aux partisans d'Ulfric était resté exclusivement confiné à la province de Bordeciel. Difficile pour ces élèves venant de loin parfois de se représenter les causes d'un conflit qui n'avait pas affecté le moins du monde leurs proches et avait pris fin bien avant leur naissance.

« Ce sont les clauses du Traité de l'Or Blanc, finit par dire une jeune femme assise à l'un des derniers rangs. Et en particulier l'interdiction faite par les elfes du culte de Talos. »

Brelyna prit le temps de détailler celle qui avait répondu. C'était une jeune femme très belle aux longs cheveux noirs qui encadraient un visage fin et aux yeux clairs qui portait une robe rouge et noir au décolleté avantageux dans lequel se glissait un petit médaillon rouge en forme de rose.

« C'est exact. Talos, aussi connu sous le nom de Tiber Septim fut le tout premier à conquérir l’ensemble de Tamriel. Il fut le premier Empereur de la lignée de Septim et parvint à surpasser sa condition de mortel pour se hisser au rang de dieu. »

C'était en tout cas le principal argument de la révolte menée par Ulfric Sombrage.

Brelyna fit doucement les cents pas devant son pupitre, observant ses élèves silencieux.

« Ulfric Sombrage mena une révolte contre l'Empire, révolte qu'il entama en tuant de sa main le Haut-roi Torygg de Bordeciel. Malheureusement, ce coup d'éclat fut également la seule véritable réussite d'Ulfric Sombrage. Il représenta un danger pour Bordeciel pendant un moment, parvenant à rassembler derrière lui plusieurs jarls régnants. Mais les batailles de Blancherive puis de Vendeaume furent d'implacables échecs pour la rébellion. Ulfric fut capturé lors de cette dernière bataille et, par édit impérial, condamné à mort. »





L'héritage des Volkihar





Prologue

Elisif gisait la tête dans la poussière et la cendre. Il faisait chaud. Terriblement chaud. Tout autour d'elle, les flammes crépitaient et montaient très haut. Tout avait été détruit par l'explosion et, autour d'elle, le monde semblait être en train de brûler. Comme une terrible prophétie de ce qui était à venir. La jeune reine de Solitude sentait son sang couler de son front jusque sur son visage et lui brouiller la vue en la couvrant d'un voile rouge. Le coude de son bras droit formait un angle aussi incongru qu'inquiétant. Au point qu'elle se demanda pendant un moment comment elle avait pu faire preuve d'une telle souplesse. Lorsque la douleur revint, elle manqua de hurler et de s'évanouir à nouveau. Elle n'était pas en état de courir, de se lever, ni même de ramper. Pourtant, elle ne pouvait pas rester là. Ses idées étaient encore trop confuses pour réussir à se mettre debout, mais elle était suffisamment lucide pour comprendre qu'elle ne devait pas rester ici. Elle tenta de bouger, mais ne réussi qu'à secouer légèrement la tête.
Un hurlement retentit.

Plus animal qu'humain. Elle ne savait pas qui avait crié et elle aurait bien été incapable de le reconnaître tant la voix était déformée par l’horreur et la douleur.

Malgré la chaleur suffocante du lieu, Elisif sentit une ligne de sueur froide couler le long de son dos alors qu'un rire incongru s’amplifiait. Un rire purement cruel alors que petit à petit le hurlement s'éteignait.

« C'est tout ce que tu as, Boéthia ? Rien de mieux ? »

Un grand bruit de chair déchirée et de tôle froissée et Elisif vit s’abattre à côté d'elle une forme qui ressemblait vaguement à celle d'une personne humaine revêtue d'une armure d'ébonite. Elle ne put s'empêcher de se redresser sur son seul bras valide, cherchant à s'éloigner. Mal lui en prit.

Il y avait quelqu'un d'autre non loin. Le guerrier d'ébonite n'avait pas été transformé seul en ce tas de chair et de métal informe. Il ne restait plus ici que la reine et celui qui avait mis en pièce l'homme en armure. Malheureusement pour Elisif, ses tentatives de fuite ne pouvaient pas échapper à ce bourreau.

Une main empoigna les cheveux blonds de la jeune femme et les tira en arrière.

« Tiens donc... tu n'es pas encore morte petite reine ? »

Elisif tenta de se débattre, mais son bras brisé ne lui permit même pas de gêner son agresseur. Celui-ci la saisit à la gorge et la serra, forçant Elisif à se remettre debout. Face à lui, la jeune femme essaya vainement de le frapper des mains et de lui donner des coups de pieds. Cela ne sembla pas le déranger le moins du monde. Bien au contraire. Il prenait de toute évidence une sorte de plaisir pervers à la voir lutter et à resserrer petit à petit sa main autour de son cou.

« Tu vas retrouver ton époux petite reine... à moins que... »

Tirant d'une poche de sa veste un cristal, le jeune homme qui la tenait l'exhiba, se délectant visiblement de la terreur naissant sur le visage de la reine. Elle était largement assez cultivée pour reconnaître la pierre et l'identifier comme une gemme spirituelle noire. Le visage écarlate à cause du manque d'air, la jeune femme commençait à arrêter de se débattre. Elle n'allait pas échapper à ce qu'il lui préparait. Déjà le sort de capture d'âme était lancé et elle allait mourir.

Quelques larmes coulèrent sur son visage.

« Allons... tu devrais être fière qu'un dieu s'intéresse à toi. »

Un bruit désarticulé quitta les lèvres de la reine qui était en train de sombrer.

« Tu devrais être fière de servir Molag Bal. »





Chapitre I: Cela fera une belle chanson

Nombreux étaient ceux qui, venant pour la première fois en Bordeciel passaient un certain temps à s'extasier devant la grandeur de Solitude. Surplombant la large rivière Karth, la ville tout entière était perchée sur une immense arche de pierre, incroyable bizarrerie géologique qui dominait les alentours et offrait, depuis le sommet de ses remparts une vue magnifique sur la Mer des Fantômes au nord ainsi que sur les grandes étendues de tourbes de Hjaalmarche à l'est. Solitude était un des plus beaux joyaux de l'Empire et l'un de ses points stratégiques les plus importants.

La vue qu'on avait depuis le sommet de l'arche était tout aussi imprenable que la cité elle-même. Face au célèbre Palais Bleu et à ses coupoles sombres à l'une des extrémités de l'arche se trouvaient les tours et les créneaux bien plus austères de Mornefort.

La citadelle qui abritait le quartier général de la Légion Impériale protégeait l'arche et offrait à la ville une défense impénétrable contre les potentiels envahisseurs.

Le vaste port de la ville ajoutait à son importance stratégique et militaire une importance économique. La rivière Karth était profonde, large et ses eaux calmes, ce qui avait permis le développement du commerce et fait de Solitude une des villes les plus riches de l'Empire.

Mais même si Solitude avait souvent eu à accueillir des visiteurs venus de tout Bordeciel et des quatre coins de Tamriel pour faire du commerce, jamais encore elle n'avait connu une pareille affluence.

À en croire les bardes de l'Académie, la moitié de Bordeciel essayait de loger dans la cité et l'autre moitié était en route pour Solitude. Que la réalité soit grossie ou non, il n'en demeurait pas moins que cela posait de très sérieux problèmes d'intendance.

Rien à Solitude n'avait été conçu pour accueillir et loger une foule comme celle qui se pressait pour entrer à l'intérieur des murailles de la cité. Le Palais bleu était certes, parfaitement à même d'offrir un lit à l’ensemble des jarls de Bordeciel ainsi qu'à leurs cours, mais là, on passait le cran au-dessus et les nobles seigneurs de la province n'étaient pas les seuls à vouloir se loger à Solitude.

Afin de pouvoir pallier ce manque de place, les autorités de Solitude avaient réquisitionné plusieurs des auberges de la ville. Les locataires qui avaient été chassés de leur chambre pour faire de la place aux hôtes de marque n'avaient pas manqué de faire bruyament entendre leur indignation en envoyant une délégation à la jarl Elisif pour exiger d'elle qu'elle leur rende ce pour quoi ils avaient payé. La jeune reine de Solitude avait été forcée de leur verser un ample dédommagement pour le préjudice et pour qu'ils ne créent pas d'émeute dans la ville.

La forteresse de Mornefort avait également été mise à contribution. Tous les hommes dont le rang était inférieur à celui de Légat avaient été envoyés camper dans l'océan de tentes qui avaient poussé en dehors des murs afin que les nobles puissent avoir un lit dans lequel dormir.

L'un des thanes d'Haafingar, avait un moment proposé d'utiliser les cellules de la forteresse pour loger d'autres invités. Falk, le chambellan l'avait sèchement repris en lui rappelant qu'il était parfaitement hors de question de demander à un thane ou à un chambellan d'une quelconque châtellerie de loger dans un endroit aussi indigne de sa condition.

Il fallait surtout éviter de contrarier ceux qui avaient l'oreille d'un thane. On allait enfin mettre fin à la guerre civile et ce n'était sûrement pas le moment de froisser les susceptibilités des alliés de toujours ou des jarls nouvellement promus dans leurs fonctions.
Les bardes ne s'étaient d'ailleurs pas gênés pour l'intégrer au chant de la Chute d'Ulfric qu'ils avaient déjà commencé à rédiger, argan avec verve qu'à Solitude, les prisonniers de droit commun furent mieux traités que certains chambellans du fait que chaque détenu avait sa propre cellule.

Car c'était bel et bien la raison de la présence de tous ces gens à Solitude. Tout le monde voulait voir la fin de la guerre civile qui avait ravagé et divisé Bordeciel pendant tant de mois. Les partisans Sombrage sans doute pour voir leur roi tomber comme un vrai héros nordique et se donner du cœur au ventre pour reprendre la lutte contre l'Empire et le Thalmor. Ceux qui œuvraient pour l'Empire, quant à eux, étaient, malgré tout leur glacis social, avide de voir la tête d'Ulfric rouler dans la poussière. La guerre d'Ulfric leur avait pris leurs enfants, ne leur rendant bien souvent qu'une lettre de condoléances signée de la main du général Tullius. Autrement, soit ces hommes et ces femmes servaient toujours sous les couleurs de la Légion, soit ils étaient revenus blessés et mutilés. Inaptes au combat.

Mais tout cela prendrait fin aujourd'hui.

Occupé à ne rien faire, Trystan observait le va-et-vient des ouvriers pour les tout derniers préparatifs, adossé à l'une des poutres de la forge de Solitude. Tout se passerait dans la cour de Mornefort. Ulfric Sombrage y serait exécuté en compagnie de Galmar Rudepoing. Il avait été question pendant un moment que tout cela se passe sur la place qui était normalement utilisée pour les exécutions, mais les autorités impériales avaient craint que pendant le transfert entre la porte des prisons et le billot, un mouvement de foule lancé par les partisans d'Ulfric ne lui permette de s'échapper. Le général Tullius avait pris la décision de faire construire une estrade au milieu de la cour du fort pour minimiser le risque.

Du point de vue de la sécurité, absolument rien n'avait été laissé au hasard. Outre les thanes et huscalrs des différences contrées de Bordeciel, on ne dénombrait pas moins de trois corps d'armée au grand complet dans la ville. Les soldats d'Haafingar, tout d'abord, qui bombaient le torse et patrouillaient inlassablement dans les rues de Solitude. Les hommes de la Légion n'étaient pas en reste dans cette épreuve de force et paradaient avec autant de faste et de bruit qu'on pouvait l'attendre de la part de soldats. Enfin, les hommes du Pénitus Oculatus paraissaient détachés et au-dessus de cette querelle de clocher et restaient concentrés sur leur mission. Et c'était ce qu'on attendait de la part de la garde rapprochée de l'Empereur.

« Hey !!! Vous !!! »

Sortant de ses pensées, Trystan leva le nez pour voir une troupe de soldats en armures impériales se mettre à courir après deux nordiques, l'arme au poing.

« Au nom du jarl, arrêtez-vous !! »

Bien entendu, ils ne s'arrêtèrent pas, essayant tant bien que mal d'atteindre les portes de Solitude. Les archers postés sur les tourelles encochèrent leurs flèches et, avec une série de sifflements, criblèrent les deux nordiques de traits.

C'était la seconde fois en trois jours qu'un incident de ce type se produisait.

Plus que tout, Tullius redoutait une tentative d'évasion intempestive ou bien de voir soudain une escouade de Sombrages armés jusqu'aux dents fendre la foule à grands coups de dagues et d'épées courtes pour arracher Ulfric au destin qui l’attendait. Aussi, il fallait montrer patte blanche et se soumettre à des contrôles réguliers. L'Empire adorait les listes et il s'en donnait à cœur joie. La prise du Palais des Roi lors de la bataille de Vendeaume lui avait offert la liste des engagés Sombrages et, plus précieuse encore, la liste des hommes riches, ou pas, qui avaient fourni de l'argent à Ulfric. Une chose est vrai pour tout les gouvernements, même ceux qui se battent pour la liberté : les dossiers les plus fiables sont toujours les dossiers financiers.

Aussi les patrouilles impériales qui sillonnaient Solitude soumettaient la population à des contrôles d'identité en se basant sur les listes recueillies. Et si jamais cela faisait ''tilt'', le gagnant obtenait un séjour dans les cachots de Mornefort ou les flèches des archers de la Légion.

Se redressant, Trystan allait s'éloigner de la forge lorsque Beirand l'arrêta.

« On a deux clientes. Occupe-toi d'elles. »

Le jeune homme ouvrit la bouche pour protester avant de se raviser sous le regard courroucé du maître forgeron. S'il ne s'occupait des clientes rapidement, il n'aurait pas le temps d'assister à l'exécution. On ne voyait pas tous les jours tomber la tête d'un roi, pas plus que celle d'un traître et d'un régicide. Tout morbide et sanglant que soit ce spectacle, c'était une occasion rare à laquelle Trystan voulait assister.

D'un autre côté, il n'avait pas le choix et ne pouvait pas se permettre de passer à côté de clients. Même si cela signifiait sans doute qu'il n'assisterait pas au plus gros événement en Bordeciel depuis ces dix dernières années.

Depuis trois années qu'il était l'apprenti de Beirand, Trystan logeait chez son maître en échange d'une partie de l'argent que son travail à la forge lui faisait gagner. Beirand ne lui avait jamais demandé d'argent pour cet apprentissage, ce qui avait toujours intrigué Trystan. Mais son épouse, Sayma, demandait une contrepartie pour le gîte et le couvert. C'était normal et revenait moins cher au jeune homme que s'il s'installait à l'auberge. Malgré tout, s'il voulait un jour avoir sa propre forge et travailler pour lui-même, il ne pouvait pas laisser filer deux clientes.

D'un pas un peu résigné et traînant, il s'approcha des deux femmes qui se trouvaient à côté de la boutique.
Toutes deux paraissaient en désaccord, mais elles se turent lorsqu'il s'approcha.

La première était une nordique d'un peu moins de trente ans plutôt bien charpentée au visage anguleux bordé de cheveux sombres qu'elle avait jusqu'aux épaules. Elle portait une armure d'acier extrêmement sobre et fonctionnelle. Les brassard et les jambières en revanche étaient plus travaillées et représentaient une mer agitée par la tempête. Du beau travail. L’œil exercé de Trystan décela la griffe de son auteur. Bien qu'il ne soit pas un expert, il lui sembla que c'était celle d'Adrianne Avennici, une forgeronne de Blancherive qui avait déjà la réputation de faire du beau travail. Venaient-elles toutes les deux assister à l'exécution ? C'était fort probable.
La seconde femme avait un maintien très... aristocratique. C'était à-peu-prêt tout ce que Trystan pouvait dire d'elle étant donné que la moitié supérieure de son visage était caché derrière un voile qui masquait tout ses traits au dessus de son nez. Plus petite que sa compagne cette femme mystérieuse paraissait également un petit peu plus jeune. Elle aussi était brune, vêtue d'une tenue de cuir noir très ajustée et portant au bras des brassards d'argent très stylisés et de curieux gants qui se terminaient par des griffes.

Sans se fendre d'un bonjour, elle défit sa ceinture et la tendit à Trystan qui l'attrapa, un rien surpris par la brusquerie du geste.

« J'ai besoin qu'on fasse réparer ma lame, dit-elle d'un ton cassant. »

Après avoir tiré l'arme du fourreau, il s'avéra en effet que le sabre de cette femme mystérieuse était brisé en trois. L’apprenti forgeron commença par tapoter et caresser le métal. Ce n'était pas de l'acier. En tout cas, pas entièrement. Une pitchenette sur la lame produisit un son grave et profond.

« De l'ébonite ? »

Elle hocha la tête alors que Trystan se faisait la remarque que cette arme à elle seule suffirait à le loger et le nourrir pendant au moins deux mois.

« Combien cela va-t-il me coûter ? Vous en avez pour longtemps ? »

Décidément, ce n'était pas la politesse qui l'étouffait. Le jeune homme dut faire un effort sur lui-même pour ne pas sur-évaluer volontairement cette commission afin de lui apprendre à être plus polie. Du moins, il fit un effort pour ne pas trop le faire. Visiblement, la nordique qui était pour le moment restée silencieuse désapprouvait le comportement de sa compagne mais ne disait rien. Il n'avait aucune aide à attendre d'elle.

« Cela fera deux cent cinquante septims et j'aurai besoin de trois jours. »

« Trop long. Une journée. Cent cinquante septims. »

Trystan eut un rire nerveux, remit les fragments de la lame dans le fourreau et le lui tendit.

« Trouvez quelqu'un d'autre qui sache travailler l'ébonite et qui acceptera de se passer de paye pour vous réparer votre arme dans ce cas. »

Cent cinquante pièces, c'était à-peu-prêt le prix d'un lingot d'ébonite. Et encore fallait-il le faire venir depuis la seule et unique mine de la province se trouvait dans les entrailles de Dévinoir qui était férocement gardée par les orcs de la forteresse de Narzulbur. Et si vous parveniez à franchir cet obstacle, il vous faudrait encore traverser tout Bordeciel en échappant aux bandits, aux ours, aux trolls et autres bestioles pleines de pattes et d'yeux pour parvenir à Solitude.

Il y eu un moment pendant lequel ils s'affrontèrent du regard. Trystan refusait de céder et de baisser la tête tandis que l'autre ne faisait pas le moindre geste pour reprendre son bien. Elle avait besoin de lui et ils le savaient tout les deux. Si elle ne voulait pas payer, lui n'avait pas l'intention de se mettre au travail.

« Très bien, finit elle par dire. Mais j'ai besoin d'une autre lame. »

Trystan hocha la tête et leur fit signe d'approcher alors qu'il allait chercher les différentes armes sorties de la forge.

La nordique de Blancherive qu'il finit par identifier comme une femme du nom de Lydia en les entendant discuter choisit pour sa compagne une rapière d'acier de bonne qualité.

« Nous reviendrons dans trois jours. Je veux ma lame prête à ce moment-là, exigea la femme en noir, toujours aussi froide. »

Trystan se contenta de hocher la tête et de ranger la bourse qu'avait rapporté la vente de rapière. Ce n'était pas lui qui avait forgé cette arme. La vente ne lui rapporterait rien.

Et il avait tout intérêt à se mettre au travail s'il voulait respecter ses délais. Quelque chose lui disait que cette femme ne serait pas des plus patientes.

* * *

Assise au milieu des gradins, se tenant à la droite de l'Empereur, Elisif se tenait aussi digne que possible malgré son cœur qui battait à toute allure. La foule était venue nombreuse assister à la chute d'une des figures les plus emblématiques de son temps. Qu'on le déteste ou qu'on l’idolâtre, Ulfric Sombrage avait marqué son époque et inscrit son nom dans l'histoire de Bordeciel.

Certains n'hésitaient pas à l'associer à Talos.

Quand on est une jeune femme, ce n'est pas tous les jours que l'on est aux premières loges pour voir tomber la tête d'une légende vivante. Ni qu'on assiste à la mort de celui qui vous a rendue veuve.

Même si elle se gardait bien de le dire ouvertement, il lui arrivait encore de revivre cette scène dans sa tête et de s'éveiller en sursaut couverte de sueur froide avec sur la langue un hurlement et dans la tête ce cri terrible qu'avait poussé le jarl de Vendeaume.

Fus Roh.

C'était les mots qu'il avait prononcé avec cette voix qui résonnait comme un coup de tonnerre.

La foule commença à s'agiter, tirant la reine de Solitude de ses pensées et la faisant se redresser sur son trône. Il fallait qu'elle reste digne et forte.

Le premier à entrer dans la cour de Mornefort fut Kashik Al'Kahmir, un Légat Impérial qui était devenu un véritable héros de la guerre contre les Sombrages. D'après certains, il avait commencé sa carrière dans les cachots de la Légion où Tullius avait proposé aux repris de justice un marché : La moitié de leur peine à servir dans la Légion contre la liberté. Le Rougegarde avait accepté le marché et certains n'hésitaient pas à dire que la guerre n'aurait pu être gagnée sans son aide. Tout de suite après Kashik venait le légat Rikke, un autre officier de la Légion qui y avait passé la grande majorité de sa vie et avait été, jusqu'à la bataille de Vendeaume, l'officier supérieur de Kashik.

La foule n'avait d'yeux que pour les deux hommes qui suivaient. Galmar, tout d'abord, un bandeau couvrant toujours la moitié de son visage entaillé d'une profonde cicatrice. Un coup de cimeterre lui avait coûté un œil lorsque les légionnaires du général Tullius avaient investi le Palais des Rois. Son seul œil jetait des éclairs à la foule comme s'il cherchait à les foudroyer à la seule force de son regard.
Le second prisonnier, quant à lui, cheminait en silence, le regard lointain droit devant lui. Ulfric Sombrage observait le billot avec un calme tout-à-fait déconcertant.

Quelques ''Ce fut un honneur jarl Ulfric !!!'' s'élevèrent parmi la foule. Au moins autant que de ''Crève, tyran !!!''.

Avec lenteur, les condamnés montèrent les marches de l'estrade. La foule retint son souffle alors qu'on plaçait Galmar sur le billot. Mais rien n'arriva. Les Sombrages ne tentèrent pas de libérer leur commandant. Il n'y eut rien d'autre que le silence, puis le vrombissement de la hache et l'impact sec contre le billot. La tête de Galmar tomba dans un panier qu'on avait placé à cet effet et son corps fut évacué par deux soldats impériaux.

Elisif avait les ongles plantés dans la paume de sa main au point que la jeune reine eut peur d'avoir percé la peau. Malgré tous ses efforts, elle ne pouvait pas desserrer les doigts. Restait à espérer que cela ne se voit pas trop.

Repoussant les hommes qui voulaient le mettre à genoux, Ulfric fixa l'Empereur de Tamriel, puis Elisif, qui ne tarda pas à détourner les yeux. Elle ne pouvait pas regarder dans les yeux celui qui avait tué Torygg.

Personne ne bougeait. On attendait. Qu'allait-il faire ? Peut-être se servir de la Voix pour se libérer ? Il en avait sans doute la force. Allait-on tenter de le faire s'échapper comme l'avait redouté Tullius ? Allait-il utiliser la Voix contre les dignitaires rassemblés dans la tribune ?

« J'aimerais que ce soit l'Auxiliaire qui manie la hache, dit Ulfrick avec la voix calme et profonde qui lui était habituelle. Cela pourra faire une belle chanson. »

Kashik s'approcha du bourreau qui lui céda son arme et le jarl de Vendeaume se mit à genoux.

« Je te retrouverai bientôt en Sovngard, dit-il à l'intention du légat qui, déjà, levait la hache. »

Elisif sursauta lorsque l'arme frappa. Elle resta le regard fixé sur la scène, sur le corps d'Ulfric qui venait de tomber sur le côté.
Torygg était vengé.

Elle était en sécurité maintenant. Cet homme ne crierait plus jamais comme il l'avait fait.

Il ne hanterait plus ses cauchemars.

Alors, d'où venait cette sensation de vide ?
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